Francophones en Amérique du Nord : Effectifs et mouvements d’ensemble vus à partir de l’état civil et des recensements (1640-1940)

Marc St-Hilaire (Université Laval), Danielle Gauvreau (Université Concordia), Marie-Ève Harton (Université du Québec à Trois-Rivières), Kris Inwood (Université de Guelph), Evan Roberts (University of Minnesota) et Hélène Vézina (Université du Québec à Chicoutimi)

Ce projet comprend trois objectifs principaux : établir les effectifs et les mouvements d’ensemble des francophones de toutes origines sur le continent entre le milieu du 17e siècle et le milieu du 20e; valoriser l’information géographique présente dans les données d’état civil ; doter les participants et la communauté des chercheurs d’outils améliorés de jumelage nominatif aux bases de micro-données de population

La recherche entreprise dans le cadre des trois axes du Partenariat – migrations, circulations et récits – mettra en valeur les ressources numériques rassemblées depuis une cinquantaine d’années par diverses équipes universitaires. Sur le plan démographique, ces ressources consistent principalement dans le fichier de population BALSAC et l’IMPQ ou Infrastructure intégrée des micro-données historiques de la population québécoise (état civil), recouvrant toute la période d’étude pour la population du Québec, et les bases de micro-données censitaires canadiennes et états-uniennes, pour la période 1850-1940 (100 % des individus). Le projet soumis ici vise à traiter de manière systématique ces ensembles de données pour d’un côté alimenter les travaux du premier axe et, de l’autre, offrir des éléments de contexte (des référentiels de base) aux travaux des deux autres axes. Pour faciliter les travaux conduits à échelle sociale fine (individus, familles, ménages) au sein d’un axe ou l’autre, le projet vise également à améliorer les outils de jumelage nominatif mis au point à BALSAC pour associer les données censitaires à l’état civil. Enfin, l’information géographique contenue dans le fichier BALSAC (résidences déclarées par les personnes mentionnées dans les actes) sera géo-référencée pour raffiner les échelles de traitement spatial des ressources documentaires utilisées. Au final, les participants disposeront d’un ensemble de données permettant de circonscrire à diverses échelles les groupes francophones faisant l’objet de la recherche et d’outils d’utilité générale pour les exploiter.

Effectifs et mouvements d’ensemble

Données censitaires canadiennes. L’ensemble des données pour la période 1851 à 1881 sera bientôt disponible. Le tout sera géo-référencé à l’échelle de la subdivision de recensement (SDR : municipalité ou l’équivalent). Les fichiers géographiques pour toutes les années seront aussi complétés bientôt, rendant la cartographie possible. Nous serons ainsi en mesure de compiler, croiser et cartographier les informations relatives au lieu de naissance (1851-1921), à la religion (1851-1921), à l’origine ethnique (1871-1881; 1901-1921) et à la langue (1901-1921) à échelle locale ou sous-régionale. Il sera donc possible de circonscrire la population francophone et son évolution ainsi que d’aborder entre autres les questions de sa distribution spatiale et sociale, d’appartenance ethno-religieuse, d’usage de la langue et de transfert linguistique. La séquence des lieux de naissance dans les familles informera de plus sur les itinéraires migratoires. Par ailleurs, dans une optique méthodologique, nous pourrons appliquer le contenu d’un dictionnaire des patronymes canadiens-français au corpus canadien, ce qui ouvre d’excellentes perspectives comparatives avec les États-Unis, tout en attestant de son efficacité.   

Données censitaires états-uniennes. Le traitement géographique sera toutefois moins raffiné que pour les données canadiennes, les références spatiales n’allant pas en-deçà du comté, échelle pour laquelle le National Historical GIS d’IPUMS dispose également des fichiers géographiques. Nous serons néanmoins en mesure de compiler, croiser et cartographier à cette échelle les informations relatives au lieu de naissance (1850-1920; plus celui des parents en 1900-1940), et à la langue (1900-1940). Idéalement, nous appliquerions le dictionnaire des patronymes aux recensements de 1850-1880 et 1920-1940 pour compléter sa critique et assurer la comparabilité avec les données canadiennes.    

Effectifs et mouvements d’ensemble : complément et géo-référencement des informations géographiques contenues dans l’état civil

Les résidences déclarées dans l’état civil révèlent les échanges démographiques entre le Québec et le reste du continent. Le projet BALSAC a développé au cours des ans un répertoire élaboré des lieux de résidence déclarés dans ces actes. À l’échelle locale, les toponymes au Québec ont été regroupés en unités spatiales correspondant approximativement à la municipalité (unité résidentielle de base, ou URB) et géo-référencées à cette échelle pour la quasi-totalité. Le projet i-BALSAC, une infrastructure multisectorielle pour une cartographie haute-résolution de la population franco-canadienne (1621-1971), piloté par Hélène Vézina, complétera ce géo-référencement et ajustera la géographie de l’état civil, tant pour les lieux d’enregistrement que pour les résidences déclarées sur le territoire québécois du XVIIe au XXe siècle. Pour les résidences nord-américaines à l’extérieur du Québec (touchant près de 5 % des mariages), le traitement vise à préciser les toponymes à l’échelle la plus fine et à géo-référencer les résidences déclarées à l’échelle locale. Il sera ainsi possible de restituer les aires d’échanges démographiques mettant en relation la localité québécoise avec celle hors Québec. S’agissant de données longitudinales par famille, il sera aussi possible de reconstituer les itinéraires résidentiels des couples.

Outils de jumelage

Aux fins de la création de données biographiques enrichies des individus et des familles, BALSAC a développé ces dernières années un programme de jumelage pour associer les données nominatives des recensements à celles des actes d’état civil. Ce programme reproduit les principes présidant au jumelage entre les actes d’état civil paramétrés par certaines informations circonstancielles : écart chronologique entre les évènements, sexe, âge, état matrimonial. Ces informations, complétées accessoirement par la résidence et la profession, fondent l’ordonnancement des unités candidates au jumelage soumises au préposé au jumelage qui prend la décision finale.